"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
13 Octobre 2014
Rentabilité non assurée et impact écologique désastreux. Alors que ces deux termes de l'équation sont de de plus en plus évidents, le pouvoir algérien continue la fuite en avant. l’Algérie pourrait commencer à produire du gaz de schiste en 2022.
Le ministre de l’énergie affirme que Sonatrach "se prépare activement" tandis que le sous-secrétaire d’Etat américain à l’énergie confirme : " Les Etats-Unis aspirent à renforcer davantage les moyens de collaboration en la matière avec l’Algérie".
Le ministre Yousfi affirme qu'il s'agit d'une option irrévocable, "l'Algérie ne faisant que s'inscrire dans le sillage des grandes entreprises multinationales" selon ses propos recueillis par Reporters-dz. Notre ministre de l'énergie est certes en phase avec les "grandes entreprises multinationales", mais qu'en est-il des nations? Tour d'horizon.
En Afrique du Sud, le plus puissant pays africain. La ministre des ressources minières, Susan Shabangu, avait annoncé, le 23 octobre 2013 que des permis de prospection du gaz de schiste seront accordés au premier trimestre 2014, mais en février dernier L’Afrique du Sud décide de se donner encore un nouveau délai de réflexion de deux ans.
Gaz de schiste, arme de l'Amérique impériale
Au plan mondial, c'est la conjonction de deux constats qui amène à remettre de plus en plus en cause le mirage du gaz de schiste. Il y a d'abord le mouvement écologique de plus en plus exigeant sur tous les continents. Il y a aussi de plus en plus l'impact des révélations sur les mécanismes financiers par lesquels les Etats-Unis -en tant que puissance impériale soucieuse d'assurer son indépendance- ont quasiment subventionné l'exploitation des gaz et pétrole de schiste dont le caractère de non-rentabilité est avéré. "Les États-Unis reviennent vraiment en arrière sur cette bulle spéculative" des gaz de schiste, affirmait le 7 octobre dernier Ségolène Royal . Hésitante jusqu'ici, alors que des dizaines de dossiers de concessions étaient à l'étude, la ministre française de l'environnement a assuré qu'il n'y aurait pas d'exploitation de gaz de schiste, ni même d'investigation sur le gaz de schiste, tant qu'elle serait ministre de l'écologie. Il est vrai qu'une large majorité de Français s'opposent à une autorisation de l'exploitation du gaz de schiste en France.
Le journal Le Monde évoque le dégrisement polonais. "A raison de 50 millions de dollars (36,7 millions d’euros) par forage, selon l’expert Andrzej Sikora, également membre de l’Institut d’études sur l’énergie de Varsovie, c’est une somme considérable qui doit être mobilisée pour pouvoir trancher la question cruciale des réserves, alors que le rythme des forages a été divisé par deux en 2013 (à 12) par rapport à 2012. Le professeur Jerzy Nawrocki, directeur de l’Institut géologique polonais, ne cache pas son pessimisme à la lumière des résultats enregistrés jusqu’à présent. « Tout le monde s’est emballé et il est désormais difficile de faire machine arrière, à commencer par le gouvernement. »
La Sonatrach est-elle armée pour se mettre dans le sillage des multinationales pétrolières comme le souhaite le ministre Yousfi? Au cours de la conférence d'Oran, rapportée par Maghreb Emergent Kaced Mohamed, directeur des projets des ressources non conventionnelles à Sonatrach, s'interroge sur le problème posé par le pourcentage de 60% d’argile dans les roches schisteuses. Il faudra davantage de matériel et de temps, dans une industrie dont « la marge de bénéfices est squelettique à l’heure actuelle», selon Alda Muttoni, responsable des études des risques du non conventionnel à ENI.
Aux Etats-Unis même "Le gaz de schiste coûte cher aux pétroliers" titrait le journal Le Monde en janvier dernier. Anne Eveno écrit : "Le miracle des gaz de schiste aux Etats-Unis tourne un peu vinaigre pour les grands pétroliers. Pas de quoi envoyer par terre leurs résultats dont la publication au titre de 2012 vient de commencer avec ConocoPhillips et Shell, mais assez tout de même pour déplaire aux directeurs financiers de ces mastodontes. En cause, la chute des prix du gaz naturel aux Etats-Unis. A 2,8 dollars par million de BTU (British Thermal Unit), le prix moyen du gaz, en 2012, sur le marché américain est très en deçà de ce qu'il était quand les majors du secteur ont investi. Résultat : ils doivent revoir la valorisation de leurs gisements".