"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
14 Août 2017
Sous le titre "La tomate industrielle replonge dans la crise. L’or rouge toujours importé", Slim Sadki rapporte dans El Watan le constat des acteurs de cette filière: "C’est la crise des années 2000 qui revient à cause de la mévente du double concentré de tomate dont près de 70% de la production de la saison 2015-2016 est encore dans les stocks.
EXTRAITS
Les conserveurs cachent l’origine du concentré importé
Dans tous les cas, les stocks d’invendus existent et ils sont importants. Nos interlocuteurs les estiment pour les seules wilayas du Nord-Est, Tarf, Annaba, Skikda, Guelma, à 70 000 tonnes, soit presque la totalité des besoins nationaux fixés eux à 80 000 tonnes de concentré de tomate (CT).
Pourquoi alors continuer à importer ? L’année dernière et au profit d’une poignée de conservateurs qui bénéficient de largesses considérables auprès des banques, 41 000 tonnes de triple concentré de tomate (TCT) ont été importées autour de 1000 dollars la tonne. C’est le prix déclaré en douane qui, on s’en doute un peu, est loin de la réalité qui elle se situe autour de 300 dollars et moins selon les régions de production en Chine.
Une bouchée de pain et si on sait qu’avec 1 kg de TCT mixée à du CT national, on fait 3 kg de CT. Faites le calcul des bénéfices avec le prix de la boîte d’un kg dans votre région. Sur la boîte de concentré de tomate que vous achetez, nous indique un cadre de la direction du commerce et des prix, il n’est pas fait mention, en dépit de la loi sur l’étiquetage, de la traçabilité et que l’origine du produit est chinoise. Imaginez un peu la réaction du consommateur algérien s’il constate que le produit est chinois alors qu’il sait la valeur du produit national, même de médiocre qualité.
Juteux marché. Et on comprend alors pourquoi les pouvoirs publics n’arrivent pas à s’imposer depuis qu’ils ont déclaré qu’ils allaient faire preuve de fermeté pour l’arrêt de ces importations dans le sillage des mesures prises pour pallier à la chute des prix du pétrole.
Les importateurs de l’or rouge sont financés par les banques publiques
Les importateurs-transformateurs sont connus sur la place de Annaba et dans tout le Nord-Est. Dans l’administration, on susurre leurs noms ou la marque de leurs produits avec le nom de leurs conserveries.
Aux Douanes, on ne communique rien à leur sujet mais on les montre du doigt comme des privilégiés. Dans le milieu, on s’interroge sur la facilité - une grande injustice - avec laquelle des crédits leur sont accordés pour continuer à importer de «l’or rouge», comme on le nomme par ici. Ce ne sont pas des inconnus, l’un d’eux s’est rendu célèbre avec des céréales et des pâtes et il fait bonne figure au FCE (Forum des chefs d’entreprise), qui fait tant parler de lui ces derniers temps.
Avant la crise des années 2000 due à l’importions du TCT, la filière tomate industrielle, rappelons-le, employait 100 000 personnes rien qu’à El Tarf, pendant la campagne et la moitié au cours d’année. Elle permettait à des centaines de familles de renflouer leur budget pour la rentrée scolaire et sociale.
Beaucoup d’enfants étaient beaux et heureux le jour de la rentrée grâce à la tomate. Ces beaux jours étaient en train de revenir avec les aides de l’Etat et des producteurs et conserveurs qui ont repris confiance. Faut-il que cela recommence pour avantager quelques privilégiés du pouvoir en place ?
Texte intégral : El Watan
La carte est tirée d'un article du Monde diplomatique de juin 2017 intitulé: La civilisation de la tomate. Le capitalisme raconté par le ketchup