"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
15 Février 2018
Jacques Jubier a gardé le silence durant 60 ans, puis il parle … L'Humanité a publié hier le témoignage de cet homme âgé de 82 ans. Le soldat Jacques Jubier avait enterré le corps supplicié de Maurice Audin, un jour d’août 1957, dans un trou de quatre mètres de profondeur creusé par des civils algériens auxquels on avait bandé les yeux…
"Une saloperie de communiste"
Il a enterré deux corps noircis en fait : "On les passé à la lampe à souder, on a insisté sur les mains et les pieds pour éviter qu’on puisse les identifier"
Jubier se souvient des mots de ce lieutenant de parachutistes qui l’avait réquisitionner: "C’est un frère de ben bella et une saloperie de communiste, il faut les faire disparaître…"
La journaliste Maud Vergnol, a présenté ainsi ce témoignage :
"Jacques Jubier a la voix un peu tremblante. Il hésite, regarde autour de lui. Mais il veut témoigner. Comme près de deux millions d’appelés, il avait préféré oublier, se taire « pour protéger (sa) famille ». Et puis, le temps a fait son œuvre. Et la peur de « représailles » de la Grande Muette s’est dissipée.
C’est l’entretien publié dans nos colonnes, le 28 janvier, avec le mathématicien Cédric Villani qui l’a convaincu. Si un député de la majorité est déterminé à faire reconnaître la responsabilité de l’État français dans l’assassinat, en juin 1957, du jeune mathématicien communiste Maurice Audin, c’est que les langues peuvent commencer à se délier… Et l’exigence d’une reconnaissance de ce crime d’État, bientôt aboutir. Avec « l’affaire » Maurice Audin, c’est la pratique généralisée de la torture pendant la guerre d’Algérie qui refait surface. Une sauvagerie institutionnalisée, dont le refoulement a rongé comme une gangrène la société française. Mais les mécanismes de fabrication de l’oubli finissent toujours par céder. Ce nouveau témoignage en est la preuve".
Bientôt une commission d’enquête sur l’« affaire Audin » ?
Alors qu’Emmanuel Macron a jugé mardi qu’il n’était « pas raisonnable de reconnaître un crime d’État sans avoir les preuves », les députés PCF et Cédric Villani envisagent la création d’une commission d’enquête, « si elle peut être utile dans la recherche de la vérité ». Sur la photo, Josette Audin entourée des députés Sébastien Jumel (à gauche) et Cédric Villani, lors de la conférence de presse qui s’est tenue, hier, à l’Assemblée nationale.