"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
14 Mars 2018
Par Houria Alioua, 14 mars 2018
Organiser une aussi importante manifestation à quatre jours du 5e anniversaire de la Milyounia du 14 mars 2013 est loin d’être un message de démarcation, mais plutôt un signe de continuité. La longévité de ce mouvement, dont le flambeau est repris par un nouveau groupe de jeunes, et malheureusement, la persistance des revendications pour l’emploi symbolisent pourtant un nouvel élan.
Les orateurs dénoncent la marginalisation politique et économique de toute une région, de ses enfants et de ses revendications. Au plus fort de l’épidémie de rougeole qui a fait 13 morts et 2000 cas confirmés à Oued Souf et Ouargla, la manifestation du 10 décembre révèle un mouvement qui fait étrangement écho à celui des Touareg de l’Ahaggar, qui sortiront le 17 mars et celui, plus ancien, des anti-gaz de schiste d’In Salah à la recherche d’un nouvel équilibre politique.
En 2013, la Milyounia des chômeurs révélait au monde un mouvement social dénonçant la marginalisation des enfants du Sud de l’emploi pétrolier et l’iniquité du développement régional fortement ressentie dans les zones sahariennes et pétrolières. La manif’ de samedi s’inscrit dans la même logique avec de nouveaux visages encore plus déterminés et plus virulents que Tahar Belabbas et Ibek Abdelmalek réunis. Abdelbaki Melouah estime qu’il s’agit d’«un point de départ pour sonder la motivation de la rue après 15 ans d’échec renouvelé».
L’objectif, selon lui, est de «montrer notre base populaire et notre pouvoir de mobilisation». Yassine Rahmani estime, lui, qu’à «Ouargla, l’emploi et le développement sont au point mort, rien n’a changé, tout n’est que fioriture».
Mohamed Benhabireche se focalise sur la marginalisation multifacettes : «Est-il admissible que les hôpitaux universitaires se concentrent tous sur la bande nord et que le CHU qu’on revendique depuis l’indépendance soit gelé sous prétexte d’austérité avec autant d’accidents mortels et risques chimiques potentiels sans un seul service de grands brûlés au Sud ?»
Là où le bât blesse, c’est le refus de Sonatrach de financer des clubs sportifs du Sud, une réalité amère, inacceptable pour les jeunes. Les slogans non plus n’ont pas changé : «L’unité nationale, une ligne rouge», «Le combat continue tant que la hogra persistera», «Ouargla, sans CHU meurt du bouhamroune», «Le travail, le logement, le développement des droits pas des rêves».
D’âpres constats qui trouvent échos chez la population choquée par les images d’enfants dévastés par la rougeole et les conditions de vie de milliers d’habitants des zones rurales enclavées et frontalières livrées à elles-mêmes.