"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
20 Mai 2018
Le reportage poignant de Hanane Guendil
Par Massinissa Mansour, 19 mai 2018
La journaliste se décrit comme faisant partie de cette génération qui a été privée de salles de cinéma. Pour tenter de comprendre ce qui s’est passé, elle est allée à la rencontre de cinéastes et réalisateurs passionnés. Le constat est amer, les jeunes Algériens n’ont jamais mis les pieds dans une salle obscure, et pourtant, l’Algérie est un grand pays de cinéma !
C’est une triste réalité. Les jeunes algériens n’ont, pour leur plus grande majorité, jamais foulé le sol d’une salle obscure. Il y a 40 ans, quasiment chaque quartier avait sa salle de cinéma, mais celles-ci ont été détournées de leur vocation première pour être transformées en des lieux de commerces, des restaurants, des salles des fêtes et autres. Pis encore certaines d’entre elles tombent en ruines faute d’entretien.
Que doit-on penser après ce constat ? La disparition des salles de cinéma traduit-elle la mort du cinéma algérien ? Que s’est-il passé ? Pourquoi sommes-nous arrivés là ?
Tant de questions auxquelles la jeune journaliste a tenté de répondre. Les réponses, elle est allée les chercher dans l’histoire récente de l’Algérie, mais aussi, auprès de cinéphiles passionnés et de cinéastes brillants.
« Dans les années 1980, il y avait à peu près 450 salles de cinéma. Aujourd’hui il n’en reste qu’une quinzaine, soit une salle pour deux millions de personnes ». Les 40 dernières années, on a assisté à une disparition programmée de ces salles obscures. La journaliste l’explique par une faillite dans la gestion de ces hauts lieux de culture.
En tout cas, c’est durant les années 1990 que la majorité d’entre elles ont été fermées. Les mesures prises dans le cadre de l’État d’urgence et la terreur qui y régnait avaient changé les priorités, bouleversant les codes de toute une société. Le cinéma algérien qui avait rayonné dans les années 1960 – 1970 s’était presque éteint.
Les salles de cinéma ont disparu. La production cinématographique a fortement diminué, mais le cinéma algérien en tant que tel n’a jamais connu le déclin. Cette idée de « déclin », les cinéastes algériens la refusent. Le scénariste et réalisateur, Yanis Koussim est l’un d’entre eux. Pour lui, le cinéma algérien n’a jamais disparu et il ne disparaîtra pas. « Si tu m’ouvres les veines il y a cinéma qui sort et c’est le cas de tous mes collègues », lance-t-il, soulignant qu’il y a toute une génération de jeunes cinéastes algériens qui font des choses exceptionnelles. « Si leurs films t’explosent à la figure, ça fait une toile expressionniste ou ces jeunes cinéastes racontent leur Algérie », décrit-il, avec hargne et détermination.
Ces productions cinématographiques, les cinéastes algériens les diffusent gratuitement sur internet. « Le film est destiné au public », affirme le réalisateur franco-algérien Damien Ounouri, qui explique que son Court métrage Kindil el Bahr, va être mis en ligne sur YouTube pour que tout le monde puisse le voir. Même le grand Merzak Allouache se livre à cette pratique en mettant en ligne ses chefs d’œuvre. Ce dernier se dit conscient que cette pratique leur est préjudiciable, mais qu’importe, ces passionnés semblent être animés par l’envie irrépressible de partager leur raison de vivre avec les cinéphiles.
À la fin de ce reportage, Hanane Guendil termine sur une note positive. La société algérienne se bouge et les passionnés de cinéma multiplient les initiatives pour relancer la machine. Le festival international de Béjaïa comme les cinéclubs qui commence à voir le jour dans la capitale son de bon augure. « Je suis plutôt optimiste pour le septième art dans mon pays », dit-elle, avant de lancer que « Le chemin sera long pour récupérer les salles et pour faire connaitre toute cette génération de jeunes cinéastes, mais il y a une telle énergie que ça vit d’une autre manière ».
Source : Algérie Focus