"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
22 Janvier 2019
Extraits de l'interview parue aujourd'hui dans El Khabar, partiellement traduite par TSA-Algérie.
« Nous avons en Algérie un problème, le pouvoir ne gouverne pas, parce que les mécanismes de fonctionnement du système tel qu’il est aujourd’hui empêchent la pratique du pouvoir »
« Si le pouvoir arrive à prouver qu’il gouverne en certains aspects, il ne rend pas compte et personne n’assume ses responsabilités »
« Ce pouvoir n’a jamais eu la capacité à gérer la société et à gérer les projets avec efficacité. Il n’a jamais pu réaliser les objectifs qu’il a tracés. Cela concerne aussi mon passage au gouvernement (entre 1989 et 1991). J’ai rencontré beaucoup de difficultés qui m’ont empêché de concrétiser mon programme et d’avoir les instruments pour réaliser les objectifs et les politiques, y compris les instruments de contrôle ».
« Il est reproché à l’opposition de n’avoir pas de programme ni de capacité de l’appliquer si elle en a alors que le gouvernement lui-même n’a pas de programme ».
Evoquant la commission Missoum Sbih sur « les réformes des missions de l’État », crée par le président Bouteflika lors de son premier mandat. « Où sont les résultats de cette commission ? Le président Bouteflika n’a pas informé les Algériens sur les difficultés qu’il a rencontrées pour organiser l’État (…) Les gouvernements successifs reproduisent les mêmes faiblesses, les mêmes pannes et les mêmes échecs ».
« Les consultations électorales et politiques ont perdu la plupart de leur contenu et de leur influence et ont perdu leur finalité aussi. Elles ne donnent pas la légitimité, n’adoptent pas des programmes et ne donnent pas de pouvoir aux élus. (…) Cela concerne le président de la République aussi ».
« Nous avons la difficulté de comprendre l’État et le pouvoir. Nous mélangeons tout le temps entre l’État et le pouvoir ou le gouvernement. Ce n’est pas une spécificité algérienne. Tous les pays du Sud souffrent de cela. Le problème chez nous est que nous n’avons pas construit l’État porté par le projet national et nous n’avons pas institué les instruments du pouvoir (…) Quand l’État est absent, les institutions le sont aussi. Autant que le contrôle et l’obligation de rendre compte. Le résultat final est l’absence de la loi. La situation ressemble à celle du marché parallèle qui envahit l’action de l’État et domine le gouvernement, l’économie et la culture (…) Quand j’ai rappelé tout cela, je ne voulais pas porter des jugements sur les personnes mais poser une question : est-ce qu’à l’intérieur du pouvoir et des appareils, un contrôle est fait pour chacun de ses membres sur les résultats de son travail ? Je n’en sais rien ».
« Ceci est un danger pour nous (…) Il ne s’agit pas d’une illusion ni d’une accusation. Il n’y a qu’à lire les articles de presse (étrangère) où l’on évoque plus la relation avec le régime en Algérie qu’avec l’État en Algérie. L’Etat a des caractéristiques dans le système international dont les fondements, les règles, les devoirs et les obligations n’existent pas en Algérie. Ces failles sont visibles dans toute la région arabe. L’une les fonctions de l’État est la protection de la société, la sécurité et la protection de chaque étranger vivant sur son territoire .
Source : TSA Algérie
POST SCRIPTUM
A la question, Comment réparer le système ? l'ancien Premier ministre Sid Ahmed Ghozali répond :
"Les moyens de s’en sortir existent dans notre pays. Mais ils coûteront cher, de plus en plus cher aussi longtemps que nous nous complairons à musarder dans la confusion et l’irresponsabilité inhérentes au pouvoir informel.
Cela passe par la réhabilitation des principes cardinaux de la gouvernance : l’État de droit, la participation de la société civile, la responsabilité des décideurs à tous les niveaux. Il faudrait commencer, par exemple, par respecter tout simplement les lois et appliquer la constitution. Pour mettre fin à ces incessantes manipulations de la Constitution on serait tenté de suggérer l’addition d’un article 236 qui stipulerait: « Cette Constitution doit être respectée ».
Texte intégral de l'entretien avec Hadjer Guenanfa: