"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
27 Juillet 2020
Evoquant la nouvelle stratégie de la direction du Pags, il écrivait : "Je considère, pour ma part, cette ligne comme défensive et poussant à la jonction, parce qu’elle en exprime bien le désarroi, avec la petite bourgeoisie occidentalisée. Elle nous coupe du peuple et de la réalité. Elle est porteuse, en germes, de positions non-nationales. C’est cette ligne qui apparaît de façon élaborée et cohérente dans le projet de résolution politique et idéologique".
le 24 juillet 1990
Il y a environ une année, j’ai répondu positivement à la proposition d’être membre du Secrétariat Provisoire de la Fédération du parti pour la région d’Alger.
Cette décision, je l’avoue, ne m’avait posé aucun problème. Nous sortions de la clandestinité, et il était naturel que je sois au poste que le parti me désignait.
Nous sommes passés par des moments difficiles, et y compris lorsque des camarades remettaient violemment en cause la légitimité de la fédération et sa représentativité, jamais, je n’ai pensé à mettre fin avant terme, c’est-à-dire l’élection des organisations du parti, à ma mission.
Je prends aujourd’hui dans des conditions qui me semblent tout autres, la décision et la responsabilité de démissionner de la Fédération. Je pense ainsi exprimer mon profond désaccord avec la ligne développée par la direction du parti depuis quelques mois, et de façon particulière depuis le scrutin du 12 juin 1990.
J’ai acquis la conviction de l’inutilité de continuer à défendre mes points de vue et opinions au sein du Secrétariat Fédéral pour une part, et pour une autre, ne partageant pas sa ligne, étant même dans l’obligation de m’en démarquer, je ne peux en réaliser les tâches.
1. J’ai déjà donné mon point de vue sur les résultats du scrutin du 12 juin et sur les orientations et tâches qui devraient en découler pour notre parti (contributions du 16 et du 20 juin 1990). Ce n’est certes qu’un point de vue personnel. Toutefois, force est de constater que la direction du parti ne semble pas vouloir tenir compte des avis d’une grande partie des camarades à la base et parmi l’encadrement, non pas qu’elle n’en ait pas écho, mais plutôt semble-t-il par une volonté de mettre tout le parti devant le fait accompli, de diriger le parti selon les seuls points de vue des membres de sa direction et de son entourage immédiat. Comment, sinon, expliquer le fait que malgré la crise provoquée dans le parti par la déclaration du 18 juin, que de très larges secteurs refusent de diffuser, on s’obstine à faire comme si de rien n’était ?
Passons sur le fait que le compte-rendu sur la réunion du CC ne mentionne même pas la moindre attention à ces problèmes.
Pire encore. Ainsi s’ouvre l’édito de SEC No 188 de juillet /août 90 (SEC : Saout Echaab, organe du Pags ndlr) :
« Réunions, bilans, débats passionnés, passionnants, critiques et auto- critiques dans les cellules et organisations du parti ; débats et luttes avec les citoyens, avec les travailleurs dans les quartiers, les usines, les champs, les bureaux. Pas de doute le PAGS vit une accélération de ses activités » (!!!)
On se croirait dans une bande dessinée de Slim ou dans un autre parti ! Le canular remplace l’analyse lucide et courageuse de la réalité.
Dans le même numéro de SEC et toujours en page 1, on propose comme étant « LA SEULE ALTERNATIVE » l’alliance avec les autres forces politiques.
Voilà comment on compte armer les camarades pour le combat.
La Conférence Nationale des démocrates du 20 juillet, devenue conférence du RCD, a confirmé l’idée que le parti sombrait, qu’il se mettait à la traîne de la pire des petites bourgeoisies, la petite bourgeoisie occidentalisée.
Le 18 juillet, la direction du parti a rendu public un autre communiqué (« Contre la ligne anti-constitutionnelle du FIS ») confirmant la ligne développée ces derniers temps. Ce communiqué illustre bien ce qu’on veut faire du PAGS.
Ce n’est pas ici le lieu d’en faire la critique ni d’en relever les innombrables contradictions.
Je considère, pour ma part, cette ligne comme défensive et poussant à la jonction, parce qu’elle en exprime bien le désarroi, avec la petite bourgeoisie occidentalisée. Elle nous coupe du peuple et de la réalité. Elle est porteuse, en germes, de positions non-nationales. C’est cette ligne qui apparaît de façon élaborée et cohérente dans le projet de résolution politique et idéologique.
2. A mon sens le problème n’est pas d’apparaître à coups de communiqués dans la presse comme les ennemis les plus déterminés du FIS, mais d’être par notre orientation et par notre action les alliés les plus déterminés du peuple.
Il me semble que l’orientation la plus juste aujourd’hui, la tâche vitale des communistes, c’est d’œuvrer à gagner la classe ouvrière et les couches les plus larges de notre peuple au combat pour la démocratie.
Ce qui est grave, le plus grand danger pour la démocratie ce n’est pas la présence du FIS , mais l’absence du peuple dans le combat pour la démocratie.
C’est sur cela me semble-t-il que doit être fondée notre ligne, c’est cela qui élargira la base sociale du processus démocratique en lui imprimant un contenu qui exprime les aspirations et les intérêts des couches les plus larges de notre peuple.
C’est cela notre responsabilité, là est le combat des communistes. En tournant le dos à notre peuple nous ne commettrions par une erreur, notre parti aura failli à sa responsabilité devant l’histoire. Ce ne sera alors plus une erreur, ce sera une trahison.
On ne peut se contenter « d’attendre que cela passe »...
3. Certains camarades évoqueront probablement « les pressions » ou « les faiblesses » idéologiques pour expliquer cette décision. C’est en tous cas l’explication déjà donnée au départ d’un certain nombre de camarades.
Il est vrai que la carte politique d’après Octobre, l’émergence de nouveaux partis, les changements que connaît le monde, ne peut épargner à notre parti un certain nombre d’implications. Seulement lorsque le malaise prend les proportions d’une crise profonde, on ne peut se contenter « d’attendre que cela passe ».
Source: socialgerie.net
*Lire aussi le rapport bloqué de Sadek Hadjerès en 1990 http://www.socialgerie.net/spip.php?article1704