"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
27 Février 2017
Le 28 février 1986, le Premier ministre suédois Olof Palme (59 ans) est abattu à bout portant par un inconnu alors qu'il sort paisiblement d'un cinéma de Stockholm, au bras de son épouse Lisbet. On a d’abord mis en cause un alcoolique déséquilibré, qui sera condamné puis acquitté en appel. Son assassin ne sera donc jamais identifié.
Il avait accédé pour la première fois au poste de Premier ministre en octobre 1969 puis l'avait recouvré en octobre 1982, après en avoir été chassé six ans plus tôt par une coalition «bourgeoise».
Palme mena une politique internationale courageuse contre la guerre du Vietnam, l’apartheid, la prolifération des armes nucléaires. Il provoqua la rupture des relations diplomatiques entre la Suède et les États-Unis pour avoir participé personnellement, en tant que ministre, à une manifestation d'opposants à la guerre du Viêt-Nam. Il ne manifesta jamais la moindre tolérance pour l’apartheid sud-africain et milita toujours pour son abolition.
Palme et Benyahia
Parmi les gens de ma génération, un rapport avait été établi entre l’assassinat jusqu'ici inexpliqué d’Olof Palme et celui du ministre algérien des Affaires étrangères quatre ans plus tôt, le 3 mai 1982. L’avion de Mohamed Seddik Benyahia avait été abattu par un tir de missile provenant de territoires kurdes "incontrôlés". Avec lui sont morts 15 diplomates algériens qui l’accompagnaient dans sa mission de médiation pour faire cesser la guerre entre l'Irak et l'Iran.
Pourquoi ce rapprochement ? Comme Palme, Benyahia fut l’un des artisans obstinés de la cessation des hostilités entre l’Irak et l’Iran. Cette guerre, que Mohamed Seddik Benyahia, diplomate de talent, œuvrait à arrêter, a été au siècle dernier une des pourvoyeuse les plus juteuses de contrats pour l’industrie mondiale de l’armement.
A la veille de son assassinat, Olaf Palme s’apprêtait à rendre publique le scandale de la corruption pratiqué par Bofors, cette entreprise suédoise fondée par Alfred Nobel (celui des Prix) et fabriquant du matériel d’artillerie. A l’époque, on disait que le procureur Tornbjorn Sebell avait découvert par hasard des milliers de pages de documents sur le trafic international de l'armement vers la guerre Irak-Iran! Ces documents indiqueraient que les producteurs européens, réunis au sein d'un cartel occulte, s'entendent pour fournir coûte que coûte les belligérants du conflit Irak-Iran.
Mieux, il semble que ce cartel clandestin existerait depuis des lustres. Il aurait été fondé par...Alfred Nobel lui-même à la fin du siècle dernier...
Synthèse blog, 28 février 2012, revue le 28 février 2017
Le secteur de l’armement ne connaît pas la crise
« Les données pour 2010 démontrent […] la capacité des principaux acteurs à continuer de vendre des armes et des services militaires malgré la crise. » Cette affirmation du Docteur Susan Jackson, chercheur sur l’industrie de l’armement, est confirmée par le Stockholm International Peace and Research Institute (SIPRI). D’après ce think tank, les ventes effectuées par les entreprises productrices d’armement seraient en constante augmentation et représenteraient en 2010 une somme de 411.1 milliards d’euros. Alors que la plupart des secteurs économiques subissent la crise de plein fouet, l’industrie de l’armement continue de prospérer et commence même à attirer la convoitise des investisseurs.
Un rapide coup d’œil sur le classement des cents plus grandes entreprises productrices d’armement, publié par le SIPRI, met en avant l’omniprésence de l’Occident dans un secteur au combien stratégique. Si les entreprises américaines sont largement majoritaires dans ce Top 100 avec 46 firmes, les représentants européens ne sont pas en reste puisque EADS se classe 7e et Thales 11e, loin derrière la 2e place du britannique BAE System. Les entreprises occidentales bénéficient principalement de la demande de certains pays émergents, qui ne connaissent pas la crise et tentent aujourd’hui de combler leur retard militaire par des achats importants d’armement. L’Inde est certainement l’un des meilleurs exemples de cette tendance. Après avoir commandé pour plus de 650 millions de dollars d’armes à la Russie en 2011, New Dehli a lancé l’un des plus gros appels d’offre internationaux de ces dernières années pour se doter d’avions de combat, et qui a bénéficié au Rafale français.
La bonne santé de l’armement s’explique également par les mutations intervenues depuis déjà quelques années. Par exemple, les producteurs offrent désormais toute une gamme de services : soutien logistique, formation, maintenance et réparation, qui accompagnent les achats de matériels, surtout si l’équipement en question est technologiquement complexe et novateur. Par ce biais, la crise économique et le ralentissement des commandes n’impactent que partiellement le chiffre d’affaire.
Principal témoignage de la bonne santé de l’industrie de l’armement, les entreprises et les investisseurs commencent à s’intéresser grandement à ce secteur qui devient peu à peu une valeur refuge.
Affaires stratégiques.info, 27 février 2012