"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
16 Mars 2013
Il y a deux ans nous avions repris dans le blog un article de Hocine Malti publié par La Nation. L’ancien vice-président de Sonatrach y évoque les conséquences desastreuse de l’absence de valorisation des capacités nationales et la fuite des spécialistes qui en découle. Les choses ont-elles changé depuis ce diagnostic ? Nous le remettons en ligne en sachant que par delà les affaires de corruption, c’est bien l’éloignement des exigences de l’intérêt national qui est le mal fondamental dont souffre notre première compagnie nationale.
Sonatrach, BRC, Halliburton et Dick Cheney
Septembre 2011
Hocine Malti,un des fondateurs de Sonatrach, a accordé une très instructive interview à La Nation.info, réalisée par Ali Saket et publiée sous le titre : « Au fond des choses avec Hocine Malti : Sur Sonatrach, les réserves de gaz, la formation des cadres et l’état de l’Algérie ». On y apprend, de manière concise, les causes des blocages observés dans divers domaines sensibles : formation, maîtrise des technologies, politique de rémunération, la non valorisation des capacités nationales. Extraits.
La presse nationale s’est fait récemment l’écho de propos particulièrement sévères de l’actuel ministre de l’énergie Yousfi sur la situation héritée de son prédécesseur le décidemment très
contesté Khelil en matière de formation. Existe- il vraiment un risque de pénurie de cadres dans le secteur des hydrocarbures ?
Hocine Malti. Si les propos rapportés par la presse sont exacts et si la réalité est telle que décrite, nous nous trouvons alors devant une situation désastreuse : l’Algérie est revenue quarante ans en arrière, au moins. Le ministre dit que nous avons pris un énorme retard dans le forage et que nous n’avons pas d’équipes d’engineering. S’agissant du forage, l’effort de formation consenti dès les années soixante-dix avait permis de produire un nombre de cadres qualifiés au point qu’une bonne partie des équipes de foreurs opérant aujourd’hui dans le Golfe sont constituées d’Algériens. En Algérie même, les plus grandes compagnies de forage au monde, Nabors par exemple, emploient des ingénieurs et techniciens algériens débauchés de Sonatrach. Au sujet de l’engineering, le ministre ne fait que confirmer ce que l’on savait et que j’avais personnellement dénoncé en de nombreuses occasions, à savoir que BRC n’avait pas formé d’Algériens dans ce domaine et n’était, en réalité, qu’une courroie de transmission, un apporteur d’affaires agissant pour le compte de Brown and Root, filiale de Halliburton, dont le président n’était autre que Dick Cheney, vice-président des Etats-Unis.
L’exode massif de cadres est le résultat direct de la faiblesse des rémunérations, de l’absence de plan de carrières et plus généralement de la politique de gestion de personnel voulue par Chakib Khelil en personne. Le système mis en place pour la promotion des cadres par ce ministre n’a servi en définitive que de camouflage à la promotion des pistonnés et des protégés et bien évidemment, au départ en nombre des plus expérimentés et des plus méritants. D’ailleurs pour revenir à ce fameux télégramme diplomatique américain, l’ambassadeur reconnait lui même qu’à une seule exception, tous les cadres supérieurs de la Sonatrach restés en place après les arrestations de 2010 ne présentaient pas le niveau requis par leurs fonctions.
Quant à l’IAP, sa situation s’est particulièrement dégradée suite à la décision de Chakib Khelil de transformer l’Institut en entreprise privée en y associant une
compagnie étrangère, la norvégienne Statoil. L’actuel ministre déplore que l’Algérie n’ait pas formé le moindre spécialiste de l’offshore. Ceci est d’autant plus étonnant que l’associé norvégien
est précisément l’un des plus grands spécialistes au monde de l’offshore…On peut se poser légitimement des questions sur un tel état de fait plutôt curieux. Peut-être est il plus profitable pour
des intérêts particuliers de faire appel à des compétences extérieures plutôt qu’à des nationaux...
La Nation.info, 27 septembre 2011
Texte intégral : http://www.lanation.info/
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Cheney en 2004 |