"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
18 Février 2013
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Par Saoudi Abdelaziz
La grève se poursuit à l’ENIEM de Oued Aïssi, près de Tizi-Ouzou, pour la satisfaction de la revendication démocratique, jugée essentielle, et qui a poussé à prolonger la grève les plus de 2000 ouvriers de ce bastion traditionnel du monde ouvrier algérien. Les grévistes de ce complexe industriel veulent élire immédiatement leurs représentants syndicaux UGTA. Ils veulent couper court aux interminables procédures manœuvrières des secteurs conservateurs de la bureaucratie syndicale « verticale » et « horizontale », dont ils connaissent la connivence avec l’administration du complexe.
La direction de l’ENIEM leur refuse les moyens de cette élection. Elle prétend hypocritement, dans sa communication à usage exerne, que l’élection d’une nouvelle section syndiale est une « affaire interne » de l’UGTA.
L’interpénétration entre syndicats et employeurs du secteur public est une réalité pesante de plus en plus mal supportée dans le monde du travail. On l’a constaté au cours des dernières grèves des postiers ou dans la zone industrielle d’Ain Smara. Cette connivence organique s’est nouée depuis la caporalisation de l’UGTAen 1968-1969. Depuis cette date par exemple, l'une des plus importantes fédérations syndicales, celle de la métallurgie, bloque le mouvement revendicatif, revendiquant le rôle de gardienne de la paix sociale dans le secteur public. Souvent ,conjointement avec celles des unions territoriales et wilayales encore contrôlées par les « instances » correspondantes du système. Dans le secteur industriel, certains syndicats autonomes, issus de la fonction publique, s’efforcent de s’implanter dans certaines branches, mais sans parvenir à pénétrer sérieusement dans le monde ouvrier.
A Oued Aïssi, comme dans la plupart des complexes industriels, les ouvriers semblent avoir opté pour la révitalisation de l’UGTA. Y arriveront-ils ? Ils exigent, sans attendre, couper le lien ombilical de l'UGTA avec l’employeur public, lien dont ils ont vérifié sur une longue période la nocivité pour l’entreprise et pour eux-mêmes. La classe ouvrière n’en veut plus. L’exigence de démocratisation de l’UGTA passe par une rupture claire et franche de cette dépendance et par le rejet du mélange des genres stérile. Mélange parfois poussé jusqu’à l’extrême comme chez Leader Meuble de Taboukert où les salariés avaient poursuivi, en août dernier, leur grève uniquement pour obtenir la déchéance de ses responsabilités électives, de « l’homme terrible », qui, cumulant la direction de la production, la présidence du comité de participation et celle de la section syndicale, a imposé aux travailleurs «plusieurs années de terreur”, avec le silence complice des structures!
Le tribunal de Larbaâ Nath Iraten avait reconnu la légalité de cette action.
Des syndicats représentatifs, démocratiquemnt élus, c’est la seule voie qui garantisse le déploiement pacifique des rapports de force dans l’entreprise, condition pour un dialogue social organisé, serein et permanent.
Saoudi Abdelaziz, 18 février 2013