"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)
7 Mai 2012
En conclusion de sa déclaration du 5 mai 2012, le Pads, s’exprimant au nom des « communistes algériens », appelle à saisir l’occasion des élections du 10 mai pour « protester contre le verrouillage et le diktat, la corruption et les injustices sociales »
Comment ? « soit en votant "nul"; soit en votant quand cela est possible pour les candidats des listes d'indépendants connus pour le soutien effectif à leurs revendications sociales, pour leurs luttes contre les ingérences impérialistes, pour leurs luttes pour les libertés démocratiques ».
La déclaration donne des consignes d’exclusion. Ainsi, elle « met en garde les travailleurs contre le vote pour le Parti dit des Travailleurs de Louisa Hanoune ». Il lui reproche notamment d’avoir été « durant la "décennie rouge" un allié politique actif des partis islamistes ultra réactionnaires criminels, responsables de l'assassinat d'innombrables citoyens, civils ou militaires, de progressistes, travailleurs et intellectuels ». Cette condamnation vise sans doute la participation de Louiza Hanoune à la rencontre de San Egidio (aux côtés de Abdelhamid Mehri et du FFS).
Le texte ne dit rien d’aussi précis à propos d’autres listes, qu’on pourrait situer dans l’opposition de gauche. Elles sont passées sous silence. Exit les listes du FFS. Exit les listes du Parti socialiste des travailleurs, se situant plus à gauche. Mais peut-être sont-elles concernées par cette autre mise en garde « contre les éléments des partis de gauche agréés par le pouvoir et qui participent sous différentes formes au dénigrement systématique de l'expérience historique de construction du socialisme en URSS. (…)
Pour couronner la liste des interdits à gauche, le Pads décrète sans que l’on sache de qui il parle : « Dans tous les cas les travailleurs ne doivent pas donner leurs voix aux partis, aux "indépendants", aux candidats, fussent-ils de "gauche" qui ne réclament pas l'abrogation de la loi scélérate sur les partis ».
Si on fait la liste de tous les interdits, on peut conclure que le Pads, n’a aucune préférence à gauche. En effet, on ne voit pas quelles listes indépendantes auraient l’agrément du Pads lorsqu’on sait que M. Ould Kablia a empêché l’émergence de listes authentiquement indépendantes. La déclaration du Pads fait mine de l’ignorer quand elle appelle à voter pour les candidats des listes indépendantes « connus pour le soutien effectif à leurs revendications sociales, pour leurs luttes contre les ingérences impérialistes, pour leurs luttes pour les libertés démocratiques ».
En fait, dans sa logique participationniste, l’appel du Pads ne laisse pas d’autre alternative que de d’aller voter « nul ». Le vote nul, auquel appelle le Pads, n’aura pour seul résultat, s’il était entendu, que d’améliorer les taux annoncés par M. Ould Kablia, au soir du scrutin. Cette démarche n’améliore pas d’un iota le rapport de forces en faveurs des forces du changement.
Voter pour voter, autant voter pour les candidats du Pst ou du Ffs, ou même pour le Pt, là où il présente un bon candidat. Quel progressiste normalement constitué, irait se fatiguer à voter nul, uniquement pour faire civiquement plaisir au ministre de l’intérieur, ou au Pads ?
Le Pads ne dispose aujourd’hui d’aucune légitimité pour s’exprimer au nom des communistes. Les communistes algériens se sont éloignés, dès 1990-91, des luttes d’appareil insupportables menées conjointement par les staliniens et les néolibéraux, alliés momentanément pour évincer Sadek Hadjerès.
Après l’implosion de janvier 1993, télécommandée par les services secrets du régime, dans une opération dans laquelle ils ont, par crétinisme, tenu leur place, les Staliniens ont participé à la création du Pads. Dans ce parti, ils ont continué à donner libre court à leur penchant naturel et théorique au sectarisme et à l’exclusion, vidant progressivement cette organisation de sa vitalité, stérilisant Alger Républicain, le journal historique de la gauche algérienne, réduit à la caricature de leurs froides ambitions. Pauvre Zenine, qui a cru qu’on pouvait faire quelque chose de durable avec le crétinisme stalinien ! Le Pads, absent des luttes en Algérie, a été réduit à l’état de groupuscule et traîne une existence virtuelle dans des rencontres internationales, sous le parapluie d’opulents partis, comme le parti communiste grec, avec lequel le Pads partage ses penchants staliniens mais pas son inexorable coupure avec les masses.
En attendant des jours meilleurs et en y travaillant, les communistes continuent de faire vivre tranquillement la flamme et de jouer leur rôle de levain, dans les syndicats, associations et mouvements larges, aux côtés de progressistes de tous horizons, et, dans le même temps, développent leurs échanges dans les cercles de communistes libres pour refonder, avec les nouvelles générations, l’identité communiste révolutionnaire moderne, à l’abri des manipulations policières et du crétinisme stalinien.
Saoudi Abdelaziz, communiste depuis août 1962, 7 mai 2012