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Le blog de algerie-infos

"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)

La problématique de l’héritage en Kabylie s’invite au débat : Témoignages poignants au congrès des femmes progressistes du RCD

Photo DR

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Par Salima Tlemçani, 25 novembre 2018

Venues de plusieurs wilayas du pays, notamment des contrées les plus reculées de la Kabylie, des centaines de militantes du RCD (Rassemblement pour la culture et la démocratie) ont pris part, durant deux jours, aux assises des femmes progressistes du parti, qui se sont achevées avec l’installation d’une nouvelle instance dédiée à la promotion des droits des femmes et à l’égalité, l’exclusion des discriminations et à la lutte contre toutes les violences à l’égard de la gent féminine.

Pour le président du parti, Mohcine Belabbas,  la mission de cette instance est «d’œuvrer à organiser les luttes pour impulser des combats en faveur de l’égalité en droit pour la fin de ces discriminations sexistes.

Dans l’immédiat, cela passe par une meilleure participation dans toutes les instances décisionnelles au sein du parti afin d’arracher une plus grande représentation politique des femmes lors des différentes élections dans le pays. La visibilité des femmes dans la vie publique à l’échelle locale, régionale et nationale est une bataille importante».

Le président du RCD a ajouté : «Nos adversaires ne se trompent pas quand ils nous accusent de vouloir bousculer l’ordre injuste et rétrograde qui condamne la femme à n’être qu’une mère ou épouse et non une citoyenne en premier lieu».

Nous savons tous que dans notre société, la violence contre les femmes est érigée en tabou par un ordre patriarcal reconduit par les forces du conservatisme qui alimentent un système aussi bigot que régressif (…). Le maintien de ce système est le fait des choix du pouvoir (…).

Le combat pour l’égalité des droits est immensément politique. Il vise un rééquilibrage dans le redistribution de la richesse nationale produite et dans les rôles des acteurs sociaux.» Mohcine Belabbas a mis en exergue «la phase critique» que vit le pays et évoqué «le système politique qui a usurpé l’indépendance et saigné le pays de ses richesses naturelles et de ses ressources humaines», avant de dire que «ces 20 dernières années ont été particulièrement effroyables parce qu’elles ont accentué la fuite des cadres, des étudiants et des jeunes, entamée durant les années 1990 par la horde terroriste».

Il a par ailleurs noté qu’à moins de cinq mois de l’élection présidentielle, «aucune lueur n’est venue éclaircir le brouillard qui assombrit le devenir immédiat et à défaut de débat sur les conditions d’organisation de ce scrutin, sur des visions d’avenir (…), nous assistons à un étalage public des luttes d’influence entre dirigeants sans légitimité».

(…) Durant trois heures, les participantes à ce congrès ont pris la parole pour témoigner de manière poignante, chacune à sa manière, de la dure réalité de leur vécu. «Je vais vous parler du problème de l’héritage dans les familles kabyles. Je viens d’un petit village de Kabylie. Je suis analphabète et je n’ai pas honte de le dire.

J’en veux à mes parents qui m’ont interdit l’école pour me marier à l’âge de 16 ans à un homme veuf qui avait 8 enfants. Dans notre village, on nous a toujours dit que la place de la femme est chez ses parents ou chez son mari. J’ai élevé les huit enfants qui ont tous fait des études supérieures.

A 38 ans, mon mari m’a chassée de la maison. Je n’ai rien eu. J’ai pu avoir une carte d’artisane qui me permet de travailler la poterie. Mon affaire en justice traîne depuis 12 ans, mais à ce jour je n’ai rien eu parce que mon ex-mari est riche et moi je ne suis qu’une femme répudiée.

Je vous demande d’instruire vos filles et ne les laissez jamais à la merci des hommes», a lancé une femme sous les applaudissements et les youyous stridents de la salle. Une autre intervenante affirme : «Les problèmes de l’héritage en Kabylie sont désastreux.

Des familles vont chercher des cousins, des oncles, des neveux de contrées lointaines pour hériter et l’épouse qui a souffert et pris part à la construction de la maison se retrouve exclue de tout et privée de ressources pour terminer sa vie.

N’y a-t-il pas pire violence que celle de jeter une femme dehors ? Il y a comme un arrangement entre les membres de la famille pour que les filles n’héritent pas, et celles qui réclament leurs droits sont souvent violentées, agressées ou certaines tuées dans le silence des autres.

Il faut que ce problème soit réglé par le droit. Eduquez vos filles ! L’instruction est leur seule protection.» Une élue a surpris l’assistance en faisant un court plaidoyer pour les femmes handicapées : «Vous dénoncez les femmes qui perçoivent un Smig de 18 000 DA, alors qu’elles sont nombreuses à travailler dans les DAS (Directions de l’action sociale) pour un salaire de 5400 DA. N’est-ce pas une injustice ?»

Toutes les interventions dénoncent le vécu des situations de non-droit, de discrimination et d’iniquité dans une région souvent présentée comme étant en avance par rapport aux questions des droits et de la démocratie.

Pour les conférencières, une institution consacrée aux luttes contre toutes ces violences vient à point nommé et peut être une tribune pour plaider l’égalité des droits et des devoirs.

Source : El Watan

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