4 Juin 2012
Confront and Conceal : Obama’s Secret Wars and Suprising Use of American Power, écrit par David E. Sanger, journaliste au New York Times, sera publié mardi 5 juin. Il est le fruit de 18 mois d’interviews avec des experts indépendants et des officiels américains, israéliens et européens qui ont été ou sont toujours impliqués dans le programme de cyber-attaques sur l’Iran. L’ouvrage révèle que dès son arrivée à la Maison Blanche, Barack Obama donne l’ordre secret de réaliser des attaques de plus en plus sophistiquées sur les systèmes informatiques qui contrôlent les principales installations nucléaires d’enrichissement en Iran.
Initié par G.W. Bush et intensifié par Barack Obama, le programme de cyber-attaques «Olympic Games » est sans précédent puisque c’est la première fois que les Etats-Unis
utilisent des cyber-armes de façon répétée afin de paralyser l’infrastructure d’un Etat. L’impulsion donnée à la création du programme remonte à 2006. A cette époque, G.W. Bush a peu d’options
satisfaisantes concernant l’Iran. L’enrichissement vient de reprendre dans l’installation nucléaire de Natanz où Mahmoud Ahmadinejad annonce vouloir faire construire 50 000 centrifugeuses. Les
alliés européens sont divisés sur l’idée des sanctions. L’option d’une attaque militaire contre les installations iraniennes est discutée à maintes reprises au sein de l’administration
américaine. Mais un plan radicalement nouveau est alors présenté par le général James E. Cartwright et des officiels du renseignement à G. W. Bush et son équipe de sécurité nationale.
Après l’autorisation du président, la National Security Agency et l’unité secrète israélienne 8200, spécialisée dans le cyberespace, développent un ver informatique complexe
pour infiltrer les ordinateurs qui contrôlent les centrifugeuses de Natanz. L’administration américaine voit également la possibilité de dissuader son allié israélien de mener sa propre attaque
préventive contre l’Iran en l’impliquant fortement dans le projet. Les premières attaques à Natanz sont limitées. En 2008, quand certaines centrifugeuses commencent à ne plus être contrôlables,
les Iraniens blâment le matériel et leur incompétence. Puis ils commencent à se méfier : ils arrêtent des pans entiers de leurs installations pour chercher des traces de sabotage et licencient
même des employés.
Quand G.W. Bush rencontre Barack Obama avant son investiture, il l’enjoint à conserver deux programmes classés : le programme de drones au Pakistan et le programme « Olympic
Games ». A son arrivée, le nouveau président commande une étude importante sur l’amélioration des défenses américaines contre les cyber-attaques et autorise la poursuite d’« Olympic Games » en
Iran, en l’intensifiant. A l’été 2010, un élément du programme est accidentellement révélé : une erreur de programmation dans le code laisse le ver informatique se répandre dans l’ordinateur d’un
ingénieur de Natanz, branché aux centrifugeuses, puis sur Internet où il se réplique : le code est exposé aux éventuels experts informatiques qui peuvent le disséquer et découvrir à quoi il sert.
L’Iran annonce avoir trouvé le ver informatique baptisé Stuxnet, depuis devenu fameux. A la Maison Blanche, Barack Obama s’interroge mais prend la décision de poursuivre le programme. De
nouvelles versions du ver continuent ainsi d’attaquer Natanz, sous la supervision du président.
Barack Obama a pourtant maintes fois exprimé ses inquiétudes concernant le programme. Un aveu américain de l’utilisation de cyber-armes pourrait permettre à d’autres Etats, à des terroristes ou à des hackers de justifier leur propres attaques. D’autant qu’aucune infrastructure étatique n’est plus dépendante de systèmes informatiques, et donc plus vulnérable, que celle des Etats-Unis. De nombreux experts pensent d’ailleurs que ce n’est qu’une question de temps avant que cela ne se produise. Par ailleurs, l’Iran est au centre de la cyber-guerre des Etats-Unis. Mais certains membres de l’administration américaine, réfléchissent à son utilisation contre la Corée du Nord, la Chine, ou encore Al-Qaida.
Affaires stratégiques-info, 1er Juin 2012
Sources : The New York Times, CBS