3 Avril 2012
« L’Europe a surexploité ses propres ressources maritimes, et elle est aujourd’hui en train d’exporter ce problème en Afrique. » Cette accusation de Willie McKenzie, militante pour la protection des océans chez Greenpeace, fait suite à la multiplication des bateaux de pêche étrangers dans les eaux de l’Ouest africain. Dans une région où la majorité des habitants vivent plus ou moins directement de la pêche, les frêles embarcations traditionnelles ne peuvent pas rivaliser avec la productivité des chalutiers étrangers. Une situation qui devient dangereuse tant pour les hommes et que pour l’écosystème.
Les espaces maritimes qui bordent l’Afrique de l’Ouest comptent parmi les plus poissonneux du monde. Pourtant, les pêcheurs sénégalais et mauritaniens ont de plus en plus de mal à vivre de leur activité. Suite à la limitation des quotas de pêche dans les eaux européennes, notamment en Mer baltique, les principales firmes mondiales ont fait route vers l’Afrique de l’Ouest où les ressources en sardinelles, sardines et autres maquereaux sont encore abondantes.
Les 1,5 millions de pêcheurs locaux recensés par l’Agence « nourriture et agriculture » des Nations unies sont aujourd’hui menacés de disparition par les chalutiers européens qui pratiquent la surpêche. Pour tenter de préserver leurs revenus, ils doivent s’aventurer bien plus au large et prendre ainsi de gros risques. Nombreux sont ceux qui décident de changer d’activité et de partir vers l’Europe. D’après le quotidien The Guardian, le volume de pêche réalisé par un chalutier européen en un seul jour équivaut au travail de 56 pêcheurs locaux pendant un an. L’ONG Greenpeace estime aujourd’hui que 25% des poissons pêchés par les flottes européennes proviennent des eaux au large de l’Afrique de l’Ouest.
La surpêche orchestrée
par les compagnies européennes menace également l’écosystème maritime. Depuis les années 1990, les stocks de poissons d’Afrique de l’Ouest sont en constante diminution, 70% pour ces dix dernières
années selon les organismes sur place.
Les ministres européens de la pêche se sont réunis à Bruxelles en mars dernier. Ils ont notamment rediscuté des différents accords signés avec les pays africains. Pourtant, le sujet de la flotte européenne surdimensionnée n’a pas été abordé, au grand dam des associations écologiques, qui dénoncent un mutisme des autorités, silence autorisant les navires européens à pêcher beaucoup plus que ce qui ne serait équitable pour les pêcheurs locaux.
3 avril 2012, Affaires stratégique.info
Sources : The Guardian, TV5 Monde, Afrique en ligne, Ecologie.TV