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Le blog de algerie-infos

"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)

Hédi Kaddour: « J’ai voulu écrire un roman-monde »

Photo DR

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Extraits de deux lectures des Prépondérants, le dernier roman de Hédi Kaddour publié chez Gallimard et qui marque la "rentré littéraire" parisienne. Le blogueur ne l'a pas encore lu mais il aime les romans de cet auteur, dont il avait dévoré, en 2005, Waltenberg, la fresque du 20è siècle européen écrite sous la dictée de maître-espions...

La Faille

"Qu’est-ce qu’un bon film, se demande l’un des personnages des Prépondérants, sinon « deux heures d’illusions pour ne laisser d’illusions à personne ? ». Ce pourrait être aussi la définition de l’ample et décapante fresque historique que publie Hédi Kaddour, où une bande de colons vit suspendue aux années 1920 (...). Les années 1920 des Prépondérants sont celles de « l’ivresse d’un entre-deux mondes », celles où se creuse une faille Nord/Sud aux traces et plaies encore présentes, celles aussi où tout aurait pu être différent. Les années des Illusions perdues et aussi des occasions manquées. Émergent, en contrepoint des Prépondérants, ces Opprimés, auxquels « un petit homme aux yeux creusés », l’Indochinois Quôc, voudrait consacrer un livre. Ils voudraient avoir voix au chapitre, s’exprimer et être entendus mais l’Histoire les muselle encore. Quôc qui a parcouru l'Asie, l'Afrique, l'Amérique, « disait à Raouf qu’il avait commencé par vouloir des réformes, il avait cherché l’appui des gens éclairés de Paris, mais l’impérialisme est une pieuvre, on ne négocie pas avec une pieuvre, on lui coupe les tentacules, et après on négocie »…(...) Ni archiviste ni entomologiste, Hédi Kaddour reconstitue cette période avec une passion conquérante des « petits faits vrais » – des événements historiques aux marques de vêtements, parfums, magasins de l’époque, en passant par les crieurs de journaux dans les rues de Paris ou le « troupeau bêlant des ponts de la Seine » que chante Apollinaire, chantre du « rythme moderne ». Et si son récit se définit en contrepoint de deux autres genres qui vont se déployer dans les années 1920 (le cinéma et le journalisme), c’est pour mieux délimiter son territoire, en particulier dans le rapport du réel et de la fiction : dans Les Prépondérants, on croise Colette et Hitler, on y entend langues et discours, et fort d'une ample documentation, le roman peut mentir, tordre la vérité et interroger le récit comme l’Histoire. Christine Marcandier, Mediapart.fr.

"La fabrique qui nous domine"

"Du sud de la Tunisie à la France encore dévastée par les batailles de la Grande Guerre en passant par l’Allemagne (dont une partie est, elle aussi, sous domination française) et la Californie, Les Prépondérants est la fresque d’une époque dont il est rarement question dans la littérature qui concerne le Maghreb. Il y est question de la domination coloniale française, mais aussi du bouillonnement intellectuel inspiré par les Jeunes-Turcs. C’est une époque où le peuple vaincu commence à relever la tête, où ses lettrés, y compris les plus jeunes, maîtrisent à la perfection leur propre culture et celle de leur dominateur. Tel le personnage de Raouf, fils de Caïd, ami de Ganthier, colon lucide, ancien combattant de la Grande Guerre. Ensemble, Raouf et Ganthier ont de longues discussions, des échanges acérés sur la politique ou sur la culture. À bien des égards, Raouf paraît souvent plus moderne, plus en avance que son mentor. Ce dernier, pour le convaincre de l’accompagner dans un voyage en Europe (et de ne pas aller en Turquie) lui lance cette phrase terrible : «  Vous n’avez pas envie d’aller voir comment on fabrique ce qui vous domine  ?  ». Akram Belkaid, Orient XXI.

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